La puissance d’une rencontre


Il y a vingt ans. À l’époque, je n’avais ni peur de la démence, ni crainte du vieillissement. Ma mémoire était bonne, mon regard “perçant”.
En effet, je suis iranien. Pas seulement le regard : tout mon être était encore profondément “persan”, et je pouvais reconnaître un compatriote à des mètres.
C’est lors d’une réunion de psychiatres lacaniens que j’ai croisé un regard familier. Un autre Iranien. On a commencé à discuter en sortant de la salle.
— Qu’est-ce que tu fais ? ai-je demandé.
— Je suis psychologue en Suède, m’a-t-il répondu.
— Et moi interne en psychiatrie. Et là-bas, comment ça marche ?
— Les Suédois ne sont pas très intelligents. Ils cherchent juste un petit truc simple pour régler le problème. Pas de discussions passionnantes comme ici.
Sur le moment, j’ai ressenti une certaine fierté de faire ma formation en France.
Mais quelques mois plus tard, cette phrase m’est revenue. Et j’ai pensé ceci :
Le rôle d’un psychiatre, comme celui d’un médecin, ou de toute personne qui aide, ce n’est pas de tenir de beaux discours. C’est de trouver, justement, ce petit truc simple qui peut soulager.
Depuis, cette idée m’accompagne. Elle a contribué à faire de moi l’homme que je suis devenu.
Je dis souvent à mes patients que je ne sais pas, ou que je ne comprends pas. Mais j’essaie de les aider, avec ce que j’ai.
Parfois, avec des moyens de bord.
Parfois, avec des idées farfelues.
Mais toujours, sincèrement.

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