Hier soir, mon frère en Iran m’a transmis le numéro d’un ami que j’avais perdu de vue depuis presque 40 ans : Adnan.
C’était l’époque de mon « décollage », ces années marquées par tant d’adieux.
Quelques années auparavant, j’étais encore un garçon quelconque, timide. En première année de lycée, j’ai décidé de changer : de devenir quelqu’un d’autre. J’ai quitté mon premier établissement pour suivre la filière mathématiques-physique.
C’est lors de ma deuxième année dans cette nouvelle voie que j’ai rencontré Adnan, ainsi que d’autres amis. Ce fut une période de grandes discussions, de rêves, d’espoirs, et de cette folle envie de refaire le monde.
À la fin de l’année, je leur ai dit au revoir : je voulais sauter une classe. Et je l’ai fait.
Encore une fois, l’année suivante, j’ai dû dire adieu à mes nouveaux camarades, car j’ai changé de filière pour entrer en médecine.
Aujourd’hui, 40 ans plus tard, j’ai retrouvé un ami à l’autre bout du monde.
Je lui ai raconté mon dernier souvenir de lui : en 1995, à une exposition internationale du livre, j’avais entendu son nom annoncé au haut-parleur. Il était invité à se présenter à l’accueil. J’avais couru pour le voir, mais il n’avait pas répondu à l’appel.
Et maintenant, le voilà au téléphone. En parlant avec lui, je me rends compte que j’ai oublié tant de noms, tant de souvenirs… Nous étions une petite trentaine en classe, et peu à peu, les visages s’effacent. Mais une voix, parfois, suffit à raviver le passé.
Qui est ton ami ?
Celui pour qui tu cours, dans l’espoir qu’il soit encore là, quelque part ?
Celui dont tu as même oublié le nom ?
Et puis, à qui la faute, au fond, si l’on se perd de vue ?
À la vie, au temps qui passe, aux chemins qui changent ?
Ou simplement à nous, qui n’avons pas su retenir les liens ?
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